Réflexions d’un pirate
Personnellement je veux bien payer les artistes… Pas les intermédiaires qui font un métier de les exploiter, et d’exploiter à l’autre bout de la chaine le consommateur. Tant qu’on aura pas une rémunération digne de ce nom des créateurs, et non pas des gens qui leur bouffent la laine sur le dos, je continuerai à télécharger et à partager profusément et de façon tout à fait illégale, sans la moindre mauvaise conscience. S’il faut pour ça crypter ma ligne, anonymiser mon IP, tunneler sur du SSH, passer par des VPN, je vais pas me gêner.
Si Claude Chabrol en personne vient me taper 10 balles parce que j’ai regardé les Biches, je cracherai pas à lui donner. Si le distributeur vient me demander la même chose, c’est mon pied dans les burnes du robot corporatiste qui les réclame.
J’ai assez claqué de blé en vinyles, puis en CD, en VHS, puis en DVD, en taxe sur des supports vierges sur lesquels on m’interdit de copier via des verrous à la con. J’en ai ras le cul qu’on me prenne pour une vache à lait, j’ai ai ma claque de voir dans les catalogues de VOD les même bouzes hollywoodiennes de 20 ans d’âge (le cinoche de série B, sauf exception, c’est pas comme le pinard, ça vieillit mal). J’en ai marre de devoir patienter jusqu’à ce que tous les intermédiaires se soient bien gavés pour avoir le droit de voir un film à la TV (que je ne regarde plus, mais pour laquelle on me réclame toujours une redevance). Ça me gonfle de devoir attendre le bon vouloir de distributeurs français pour voir au cinoche un film sorti ailleurs trois ans plus tôt. Ça me gave de voir que des films superbes ne seront jamais distribués en salle parce q’UGC et Cie auront décidé qu’il n’y a pas de public pour et préfèrent à la place te refiler une merdouille formatée selon les meilleures règles du marketing avec screen testing et autres sondages de merde au mépris des intentions de l’auteur qui sera bien forcé de revoir son montage.
Le système de distribution de la culture est vérolé, pourri jusqu’à l’os, régenté par la maximisation des profits. et soyons clairs : j’encule les profiteurs, à sec et au fer rouge.
Alors, oui, je « pirate ». Non seulement je télécharge, mais je copie et je met à disposition. Et pire : j’en suis fier. Je fait ça depuis des années, et j’ai fait des milliers (oui, j’ai bien dit milliers, au pluriel) d’heureux. Quand je refile une copie d’un docu finlandais des années trente à trois pelés et un tondu et qu’ils aiment et le disent, ça me met du baume au coeur. Quand je fait découvrir un Viénet ou un court d’Anger à quelqu’un qui ne connaissait pas je suis content. Quand une copine me demande si par hasard j’aurais pas un film japonais des années soixante encensant le bondage, et que je met la main dessus, je suis fier de moi, et trop heureux de le partager. Et c’est pas parce que la sinistre de la culture, et le nain de l’Élysée sont inféodés aux lobbies de l’industrie culturelle que je vais arrêter.
Ce que ces abrutis oublient dans l’histoire c’est l’immense plaisir qu’on peut tirer de partager. Comme quand on donne un livre qu’on aime. Comme quand on traine un môme au musée et que ses yeux brillent.
Et j’abandonnerai sous prétexte que les couilles en or des industriels de la distribution culturelle ne sont plus assez gonflées ? Autant me demander de cesser de respirer… Soyons clairs Hadopi ne me convaindra pas d’arrêter, juste de me cacher un peu mieux, ce que je n’aurais aucune peine à faire.
Et ce qui m’emmerde dans cette loi pompeusement dénommée « Création et Internet », n’a même rien à voir avec les craintes qu’en tant que pirate assumé je pourrais avoir de me faire prendre. Non, ça a à voir avec le flicage systématique que par-ci par-là, de la Nouvelle-Zélande à la Grande Bretagne, les gouvernements modernes tentent de mettre en place. On crée médiatiquement des ennemis (pédophiles, mafieux, violeurs etc.. demandez à Frédéric Lefèvre), dans le but avoué de lutter contre eux, et dans le but autrement inavouable de contrôler la parole des gens. Hadopi n’est rien d’autre qu’une étape dans l’esprit des mafieux légaux qui régissent nos existences (et je ne parle pas là des gouvernements mais des multinationales qui les influencent).
La loi qui va passer, je vais me contenter de la violer au quotidien, et sans aucun remords, sans même le sentiment de commettre un délit. Et si d’autres du même genre lui succèdent, je chercherais tous les moyens techniques à ma disposition pour les contourner, et j’en ferais profiter mes potes.
Et toc.
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